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Crise d’autorité au Sénégal : Bassirou Diomaye Faye, président en sursis face à l’ombre de Sonko ? Par Ndiawar Diop

Crise d’autorité au Sénégal : Bassirou Diomaye Faye, président en sursis face à l’ombre de Sonko ? Par Ndiawar Diop

Président fantôme ou Premier ministre tout-puissant : le Sénégal en quête de son vrai leader ?

Qui dirige vraiment le Sénégal : Bassirou Diomaye Faye ou Ousmane Sonko ?

Double pouvoir au sommet : le Sénégal piégé entre rivalités et confusion d’autorité ?

Autant de questionnements qui méritent une analyse plurielle !

La situation politique actuelle du Sénégal s’avère marquée par un paradoxe notable, fruit des récentes élections présidentielles et des stratégies déployées au sein de PASTEF. En effet, en 2023, les leaders de ce parti, Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye, ont été emprisonnés pendant presque une année, avant d’être libérés à quelques jours seulement des élections du 24 mars 2024. Cette période d’incarcération, suivie d’une libération précipitée, a suscité un élan de soutien auprès de la base militante, solidifiant l’idée d’un changement politique imminent.

Avec l’inéligibilité d’Ousmane Sonko, conséquence de divers affrontements juridiques, ce dernier a fait le choix stratégique de désigner Bassirou Diomaye Faye pour représenter les couleurs de PASTEF lors de cette échéance cruciale. Cette tactique a permis d’entretenir l’engouement autour de PASTEF et d’ancrer son discours de rupture auprès des électeurs. Au final, Bassirou Diomaye Faye est élu président de la République grâce à cette base électorale déterminée, qui voit en lui le vecteur d’un changement tant attendu.

Cependant, une dynamique inattendue émerge rapidement au sein de la présidence, avec des tensions visibles entre les deux hommes forts de PASTEF. Bien que Bassirou Diomaye Faye occupe le poste de chef de l’État, son statut paraît fragilisé face à un Ousmane Sonko omniprésent, nommé Premier ministre. Ce dernier ne se contente pas de seconder le président, mais semble au contraire le supplanter sur la scène politique, suscitant une série de questions sur la répartition réelle du pouvoir exécutif.

Cette configuration pose un défi institutionnel inédit au Sénégal. La Constitution désigne le président comme chef de l’État, garant de la stabilité et de l’autorité de l’exécutif. Pourtant, dans les faits, Ousmane Sonko occupe une position prépondérante, donnant l’impression que le pays est dirigé sous son impulsion. Ses prises de position anticipent souvent celles du président, et ses décisions pèsent lourdement sur les orientations politiques, au point d’éclipser Bassirou Diomaye Faye.

Cette ambiguïté a des implications profondes pour le système de gouvernance sénégalais. Certains analystes estiment qu’Ousmane Sonko, en tant que Premier ministre, devrait laisser à Bassirou Diomaye Faye l’espace nécessaire pour exercer pleinement ses prérogatives présidentielles. Le Sénégal, après des années de turbulences politiques, a besoin de clarté au sommet de l’État pour éviter toute confusion, particulièrement à un moment où la stabilité reste une priorité capitale.

Un autre point de discorde s’ajoute à cette complexité institutionnelle : la nomination de Samba Ndiaye à la présidence du conseil d’administration de la SN-HLM. Cette décision a été perçue comme une trahison par une partie de la base militante. Nombreux sont ceux qui reprochent à Samba Ndiaye des choix passés, et sa nomination a ravivé de vieilles rancœurs. Conscient du mécontentement, Sonko a tenté de calmer ses partisans en expliquant que cette nomination résultait d’une recommandation de certains alliés peu informés des reproches faits à Samba Ndiaye, et a même suggéré que des « mesures correctives » pourraient être envisagées par le président.

Or, contre toute attente, Bassirou Diomaye Faye a pris ses distances avec la position de Sonko. En conférence de presse, il a affirmé qu’il n’envisageait pas de révoquer Samba Ndiaye, arguant de la nécessité de tourner la page de cette polémique en faveur de la réconciliation nationale. Cette prise de position a engendré des remous au sein de PASTEF, suscitant l’inquiétude de figures influentes du parti, comme Abass Fall et Wally Diouf Bodian, qui partagent le point de vue de Sonko. Pour certains observateurs, cet épisode traduit un désaveu direct de Sonko par le président, préfigurant une fracture potentielle au sein de PASTEF.

La gestion de cette nomination controversée soulève ainsi une question centrale : celle de la légitimité et de l’autorité au sommet de l’État. Le Sénégal se retrouve face à un dilemme institutionnel où le Premier ministre semble défier, voire surpasser, l’autorité présidentielle, et cela pourrait creuser un fossé entre les deux hommes. Pour les partisans de Sonko, cette situation met en lumière le poids qu’il continue d’exercer malgré son rôle officiel de subalterne.

D’autres, cependant, y voient une stratégie visant à rappeler les méthodes passées de Sonko, qui a souvent utilisé des moyens indirects pour gagner du temps dans ses batailles judiciaires. Son habileté à orchestrer des symboles et des gestes a, en effet, contribué à construire son image de leader insoumis. Néanmoins, la complexité de cette situation actuelle ne peut être minimisée, car elle crée une confusion qui pourrait saper la stabilité de l’État et affaiblir la crédibilité de l’institution présidentielle.

Pour sortir de cette impasse institutionnelle, un appel à la transparence et à la clarification s’impose. Il est impératif qu’Ousmane Sonko reconnaisse et respecte les prérogatives de Bassirou Diomaye Faye, en lui accordant une autonomie réelle dans l’exercice de ses fonctions de président. De même, Bassirou Diomaye Faye doit s’affirmer dans son rôle et affirmer son autorité pour restaurer la confiance du peuple dans le leadership du pays.

Le Sénégal, après une décennie de gouvernance sous Macky Sall et les tensions qui ont entouré l’arrivée au pouvoir de PASTEF, se trouve à un tournant décisif. Il appartient aux dirigeants de garantir une gouvernance apaisée et cohérente, condition indispensable à la stabilité nationale. Le pays ne peut se permettre de naviguer dans un climat de double pouvoir, où l’exécutif se voit tiraillé entre deux figures de proue. La consolidation de l’autorité du président est essentielle pour éviter de plonger le pays dans une nouvelle phase de troubles.

Cette dualité au sommet de l’État sénégalais, bien que née de stratégies électorales habiles, menace aujourd’hui de fragiliser la gouvernance. L’ambiguïté entre les rôles du président Bassirou Diomaye Faye et du Premier ministre Ousmane Sonko met en exergue un besoin urgent de redéfinir les fonctions de chacun, pour assurer au Sénégal un avenir politique serein et respectueux de ses institutions. La restauration de l’autorité légitime du chef de l’État est une étape importante pour que le Sénégal puisse aspirer à la paix et au progrès, dans un contexte de réformes où chaque acteur doit trouver sa place et assumer pleinement ses responsabilités.

Par Ndiawar Diop
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